René Messier
Ses origines
René Messier a laissé sa trace sans faire partie de l’histoire. Il était associé aux coureurs des bois tant décriés par les autorités civiles et religieuses. Elles ont multiplié les ordonnances pour contraindre nos ancêtres à demeurer sur leur terre. Ils négligeaient la terre pour la traite des fourrures qui était beaucoup plus lucrative. On trouvait les coureurs des bois coupables des désordres encourus par la vente de l’eau-de-vie aux Indiens.
Les curés pouvaient bien les dénoncer du haut de leur chaire en affirmant que leur morale n’était pas toujours exemplaire; rien n’empêchait nos ancêtres de sillonner les rivières à la recherche de liberté et de commerce avec les fils de la nature.
René est né le 20 avril 1681, au Cap-St-Michel à Varennes. Il était le douzième et dernier enfant de Michel Messier et d’Anne LeMoyne. Le lendemain, il est baptisé et enregistré à Boucherville. Jeune enfant, René voit son père partir à la guerre contre les Iroquois. Comme capitaine de milice, son père s’est souvent absenté quelques jours ou plus longtemps pour la guerre. Alors qu’il a quatre ans, il voit son père quitter sa famille pour les Outaouais, afin de faire la traite avec les Indiens. Trois ans plus tard, son père repart, toujours pour la même raison avec l’assentiment de l’autorité civile. Âgé de onze ans, René apprend que son père est prisonnier des Iroquois. À peine rentré, son père repart pour la traite à Michillimakinac. Toutes les absences de son père ont dû le marquer et le prédisposer à la vie qu’il a menée plus tard.
Le 9 août 1697, âgé de seize ans, René apparaît dans l’histoire. À Varennes, il est parrain de Marie-Anne Hébert, fille d’Ignace et Jeanne Messier, sa sœur. On revoit René apparaître dans les registres paroissiaux plus de quarante fois. Il est toutefois difficile de savoir si le René, mentionné aux registres, est le père ou le fils. Il est quelquefois parrain, présent à un mariage ou à une sépulture.
Sa famille
Le 18 janvier 1706, à Varennes, âgé de vingt-quatre ans, René épouse Catherine Bissonnet, fille de Jacques et Marguerite Colet. Le mariage se termine avec le décès de Catherine, survenu le 17 janvier 1715. La sépulture de celle-ci a lieu le lendemain, à Varennes.
Trois ans et demi plus tard, René se retrouve devant l’autel. À Batiscan, le 25 août 1718, il prend Marie-Madeleine Cinq-Mars/Guillet pour épouse, fille de Louis Guillet et de Marie Trottier. À Varennes, René sera père seize fois. Sept de ses enfants, un garçon et six filles parviendront à l’âge adulte et prendront mari et femme. Catherine Bissonnet sera la mère de sept de ces enfants. Marie Madeleine Guillet sera, quant à elle, mère huit fois. Il reste le seizième. Cette enfant est Marie Madeleine Louise, fille de Marie, sa servante et esclave. Cette femme était indienne de nation Panis.
Les enfants de René Messier et de Catherine Bissonnet
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René nait le 23 août 1706 et décède le 21 janvier 1707 à Varennes;
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Catherine nait le 5 août 1707. Elle épouse Joseph Lefebvre, fils de Jacques et de Marie Beaudry, le 23 juillet 1731 à Varennes. Elle décède le 30 mars 1754 à Baie-du-Febvre;
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Marie-Anne naît le 2 janvier 1709. Elle épouse Louis Chevrefils, fils de Louis et de Geneviève Pailler, le 7 janvier 1733 à Varennes;
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Élisabeth naît le 7 mars 1710 et décède le 8 juin 1710 à Varennes;
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René naît le 4 juin 1711. Il épouse Suzanne Bélisle/Lefebvre, fille d’Ignace et de Marie Trottier, le 8 novembre 1734 à Trois-Rivières. Après le décès de son épouse, le 13 mai 1749 à Varennes, il épouse Angélique Lepailleur, fille de Michel et de Cathérine Jérémie, le 28 juillet 1749 à l’église Notre-Dame de Montréal. René décède le 5 décembre 1793 à St-Hyacinthe;
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Jean-Baptiste naît le 1er novembre 1712 et décède le 9 mars 1718 à Varennes;
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Agathe naît le 11 février 1714. Elle épouse Jacques Charbonneau, fils de Jean et Catherine Chaudillon, le 7 janvier 1737 à Varennes. Elle décède le 4 février 1761 à Varennes.
Enfants de René Messier et de Marie-Madeleine Cinq-Mars/Guillet
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Marie-Agnès naît le 5 août 1720. Elle épouse Louis Gauthier, fils de Jacques et de Françoise Lambert, le 7 mai 1742 à Varennes. Le 24 janvier 1780, à St-Denis-sur-Richelieu, elle épouse Jacques Deslandes/Champigny, fils de Jean-Baptiste et de Marie-Geneviève Serrant. Marie-Agnès décède le 24 octobre 1785 à St-Denis-sur-Richelieu et est inhumée le 26 à St-Antoine-sur-Richelieu;
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Joseph naît le 27 novembre 1721 et décède le 1er décembre 1721 à Varennes;
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Joseph naît le 15 octobre 1722 et décède le 22 juillet 1723 à Varennes;
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Marie-Madeleine naît le 2 janvier 1724. Elle épouse Édouard Lalonde, fils de Guillaume et de Madeleine Edeline, le 17 avril 1744 à Ste-Anne-du-bout-de-l’Île où elle décède le 20 février 1750;
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Basile naît le 17 juin 1725;
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Marie-Josèphe naît le 26 août 1726. Elle épouse François Beauregard, fils de Vincent et de Catherine Pinard, le 21 janvier 1754 à St-Denis-sur-Richelieu. Marie-Josèphe décède le 8 février 1815 à La Présentation;
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Augustin naît le 27 novembre 1728;
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Marie-Thérèse naît le 25 février 1731.
Ses esclaves
Dans son dictionnaire des esclaves en Nouvelle-France, l’historien Marcel Trudel a recensé un total de 4092 esclaves, dont 2692 Amérindiens et 1400 Noirs. Dans leur guerre entre eux, les Indiens faisaient des prisonniers. Les Indiens Panis capturés étaient conduits à Michillimakinac puis vendus aux Français. Ils avaient la réputation d’être assez dociles s’ils étaient bien traités. Le territoire des Panis était situé au sud-ouest du lac Michigan dans l’état du Nebraska.
Comme il est mentionné plus haut, en 1707, René avait acheté à Michillimakinac, Marie, jeune Panisse âgée d’environ quatorze ans. Elle a eu une enfant avec René. Elle le porta en même temps que le troisième enfant de Catherine Bissonnet. Les deux femmes accouchèrent à peu près simultanément. Marie donna naissance à une fille le 28 décembre 1708 et Catherine Bissonnet eut son enfant cinq jours plus tard, soit le 2 janvier 1709. L’enfant de Marie ne vécut pas longtemps. Elle devait décéder le 2 octobre 1712. Sa sépulture eut lieu le quatre, à Varennes. Les registres mentionnent que Marie est décédée le 10 février 1762, âgée d’environ soixante ans. L’âge mentionné au registre est erroné. Elle aurait eu son enfant à six ans. Ayant quatorze ans en 1707, Marie avait plutôt environ soixante-neuf ans.
Le deuxième esclave de René fut également un jeune Panis. Il fut acheté fin août 1717, à Michillimakinac. René ne fut pas chanceux avec lui. Huit mois plus tard, le garçon, âgé d’environ douze ans, tombe dangereusement malade. Après quelques instructions sur la religion, il est ondoyé par monsieur de St-Claude, curé de Varennes. René transporte ensuite le jeune Indien dans son canot. Il se rend voir le chirurgien Henry Bélisle à la Pointe-aux-Trembles. Malheureusement, il ne peut sauver le garçon. Sur les dix heures du soir, le 26 avril 1718, le garçon expire fort paisiblement. Il est inhumé dans le cimetière de la Pointe-aux-Trembles.
Enfin, son troisième esclave est également un Panis, âgé de sept ans, acheté en 1737. Le 15 mars 1738, il est baptisé à Varennes. Devenu adulte, il prend le nom de Jean-Baptiste Duchesne. Le 15 juin 1748, alors âgé d’environ dix-huit ans, Jean-Baptiste Duchesne achète de Pierre Viau, une terre à Soulange. Il est dit que René Messier est son maître. Que devint Jean-Baptiste Duchesne? Je n’ai rien trouvé sur lui. De futures recherches un peu plus poussées pourraient donner quelques informations. Le 14 août 1750, on enterre, à Ste-Anne-du-Bout-de-l’Ile, une petite fille du nom de Marie-Thérèse Duchesne, fille de Jean-Baptiste Duchesne. La mère de Marie-Thérèse m’est inconnue. Comme son baptême n’est pas mentionné dans les registres, il est possible que celle-ci soit Indienne. Une Française aurait fait baptiser son enfant à la naissance.
René n’était pas le seul Varennois à en posséder. Le dictionnaire des esclaves mentionne qu’il y a eu quarante-six Amérindiens et quatre Noirs à Varennes. On les retrouve, ainsi que leurs enfants, tout au long du dix-huitième siècle. Peu étaient enfants d’esclaves. Parmi les quatre Noirs de Varennes, il y avait une femme, Sarah.
Enfin une dernière note sur eux. En 1721, un grand feu détruit une cinquantaine de maisons à Montréal. Il fut allumé par une esclave noire, Marie-Josephte Angélique, qui voulut se venger de son maître. Je ne crois pas que le feu ait détruit les bâtiments de Michel Messier. Si l’on suppose que le vent soufflait d’ouest en est, la propriété de Michel étant située à l’ouest, et à l’extérieur de l’enceinte, a probablement été épargnée.
Les démêlés de René avec la justice
Avec la vie aventureuse de René, on ne doit pas se surprendre de ses problèmes avec la justice. À trente-sept ans, René doit y faire face pour la première fois. En 1718, au début de l’été, on chuchote que quatorze personnes, dont René Messier, ont contrevenu à une ordonnance de 1716 qui défend d’aller en Nouvelle-Angleterre sans permission. La rumeur arrive aux oreilles des autorités qui réagissent rapidement.
Le 23 juillet de la même année, une ordonnance de comparaître est remise à quelques personnes qui ont fait ces affirmations. Les témoins sont des gens de Laprairie, St-Lambert, Varennes, Montréal et de l’île Ste-Thérèse qui fait face à Varennes. Un témoin, Jean Lemire de l’île Ste-Thérèse, comparaît le 8 août. Celui-ci affirme qu’il a bien entendu la rumeur, mais n’a aucune preuve que les accusés ont enfreint la loi. Dans sa déposition, Jean Lemire affirme que René Messier est souvent absent de chez lui.
La déposition des témoins est unanime; ils ont tous entendu la rumeur, mais n’ont aucune preuve que les accusés soient allés en Nouvelle-Angleterre. Devant ces affirmations, le juge Pierre Raimbault décide, le 16 août, de faire comparaître les accusés. Trois jours plus tard, le 19 août, d’autres témoins passent devant le juge. Jean Larocque de Varennes affirme que René Messier était allé à Québec, le printemps dernier, durant la période où il est accusé d’être allé en Nouvelle-Angleterre. Un autre témoin, Augustin Gauthier, également de Varennes, affirme que René Messier était allé à Québec pour faire des arrangements avec les prêtres pour un voyage au Mississippi. Il déclare également que René a un employé : Jean-Baptiste Dessureaux.
Le 23 août, un nommé Delafosse, huissier, livre au Cap-St-Michel des assignations à comparaître; René est absent. Elle est remise à Jean-Baptiste Dessureaux. René doit comparaître le samedi suivant. Le 27 août, jour de sa comparution, René ne se présente pas. Le 2 septembre, René se trouve devant le juge. Il affirme être de retour de Batiscan depuis deux jours (il vient de se marier). Dans sa déposition, René affirme qu’à la période où on l’accuse d’être allé en Nouvelle-Angleterre, il était à Batiscan chez monsieur Guillet pour courtiser sa fille. Les jours où il a voyagé, il dit s’être arrêté à Trois-Rivières, chez le sieur Laroche. Les autres jours, il couchait sur les bords de l’eau. Il affirme que son voyage a duré un mois, soit de la fin d’avril à la fin de mai.
En plus de René, quatre autres accusés ont témoigné le 2 septembre. L’un d’eux, Guillaume Barrette dit que, chaque fois que quelqu’un est parti de chez lui, la rumeur court qu’il est dans les colonies anglaises. Dans les semaines qui suivent, le procès se poursuit. D’autres accusés comparaissent. Le 7 novembre, pour faire suite aux dépositions, cinq accusés sont condamnés à l’amende. Le juge Pierre Raimbault veut plus d’informations sur René Messier et quelques autres accusés. Il veut faire comparaître quelques témoins, dont Monsieur Guillet de Batiscan et monsieur Laroche de Trois-Rivières en ce qui concerne le fils de notre ancêtre.
Au cours du mois de janvier 1719 comparaissent plusieurs témoins demandés par le juge. Cependant, les minutes du procès sont muettes sur la déposition des sieurs Guillet et Laroche. Ces hommes ont-ils comparu? Si oui, leurs dépositions ont disparu du dossier. Les dernières minutes datent du 19 mars 1719. Elles sont muettes sur le verdict du juge.
En conclusion, il est possible que René ait été acquitté. Si on le suit en 1718, il était à Varennes, le 15 mars, comme parrain de Renée Dessureaux. Le 23 août, journée où il reçoit son assignation à comparaître, il est à Batiscan. Le jour suivant, il est chez le notaire qui rédige son contrat de mariage avec Madeleine Guillet. Le 25 août, il est toujours à Batiscan pour son mariage. Il prend plus ou moins cinq jours pour revenir à Varennes où il constate qu’il devait se présenter le 23 août. Le 2 septembre, c’est sa comparution.
Deuxième démêlé de René avec la justice
Le 30 juin 1726, René couche ce soir-là à la prison de Trois-Rivières. Quels sont les événements qui se sont passés pour conduire notre aventurier à la prison?
Tout commence par une plainte des marchands de Trois-Rivières. Ceux-ci se plaignent que de nombreux coureurs des bois sillonnent la rivière St-Maurice et leur causent des préjudices dans leur commerce de la fourrure. Sur l’ordre du lieutenant Hertel, commandant des troupes à Trois-Rivières, un détachement de quelques soldats, commandé par Jean François la Guérite, remonte le St-Maurice jusqu’à un endroit nommé la Gabelle. À cet endroit, le groupe s’installe et surveille la rivière dans l’espoir de surprendre quelques coureurs des bois.
Après cinq jours d’attente, vers 5 ou 6 heures du soir, la patience des soldats est récompensée. Ils aperçoivent deux canots descendant la rivière. Se voyant aperçus, les canotiers accostent immédiatement. On envoie un canot avec trois hommes pour identifier les occupants. Réalisant que ceux-ci sont français, les soldats les somment de les suivre auprès de leur officier. Celui-ci les informe des ordres qu’il a reçus. Les prévenus semblent accepter de suivre les militaires jusqu’à Trois-Rivières.
Chemin faisant, les canotiers décident de se séparer. La troupe étant trop petite, il lui fut impossible de poursuivre les deux. Ils mettent la main sur les occupants d’une embarcation, en l’occurrence celle de René Messier et d’un nommé Guyon. Tous deux sont conduits à la prison de Trois-Rivières et leurs biens saisis.
Le 16 juillet, René Messier est interrogé par le gouverneur des Trois-Rivières, le sr de Tonnancourt. Le rapport est ensuite envoyé à Québec à Michel Bégon. Celui-ci examine le rapport du procureur du roi et, n’ayant trouvé aucune fourrure dans le canot de René et de son compagnon, il prononce son verdict : « Preuves insuffisantes ». Une ordonnance du 27 juillet 1726 le libère et on lui remet ses biens saisis « pour ne pas laisser périr les preuves qui pourront être contre les Messier et Guyon ». C’est ainsi que faute de preuve, René est acquitté.
Troisième démêlé de René Messier avec la justice
Dès le 29 avril 1716, René signe une reconnaissance de dette avec un marchand de Québec. Cette obligation annule de nombreux billets qu’il a faits. Vingt ans plus tard, René attire encore l’attention sur ses activités. Le séjour de René à la prison de Trois-Rivières n’a pas refroidi son désir de parcourir les bois. Il semble jouer de prudence. Cependant, il attire encore la curiosité des autorités de Trois-Rivières. Neuf ans après sa sortie de prison, durant l’hiver 1735-36, il se trouve sur le St-Maurice. Au nord de Trois-Rivières, René et un nommé Troisville, habitant de l’île Dupas, construisent une cabane. René prétend que le lieu lui appartient, l’ayant reçu de son père qui, lui-même, l’avait reçu en concession du roi.
Au printemps, afin de défricher le terrain qui entoure leur cabane, son compagnon décide de mettre le feu au bois pour accélérer le travail. L’incendie a pris de telles proportions qu’ils en perdent le contrôle. Les autorités de Trois-Rivières doivent acheminer des gens pour aider à l’éteindre. Celui-ci menaçait les nouvelles installations des forges; ce qui aurait causé de grands dommages à l’économie. Le gouverneur Gilles Hocquart sait bien que cette cabane est un prétexte pour mieux faire la traite avec les Sauvages.
Le 28 mai 1736, le gouverneur, doutant des prétentions de René, lui demande de produire les titres de propriété pour prouver ses avancés. De plus, il lui interdit ainsi qu’à toute autre personne de faire la traite avec les sauvages. Il lui défend de construire de nouveaux bâtiments jusqu’à ce qu’il prouve qu’il est le propriétaire du terrain, et même d’y résider sous quelque prétexte que ce soit.
On dit souvent qu’il n’y a pas de fumée sans feu. Je crois qu’avec tout ce qu’on retrouve aujourd’hui sur René, on doit constater qu’il fut un grand voyageur, et que ses méthodes de faire du commerce étaient plus ou moins légales.
Ses voyages
Parler de René n’est pas toujours une chose facile. Il y a les voyages officiels : ceux faits par affaires sur les rives du Saint-Laurent et ceux qu’il faut deviner à travers ses nombreuses activités.
René fait la traite des fourrures de façon officielle. Il s’associe avec une autre personne, fait des achats chez un marchand pour ses échanges avec les Indiens; et il engage des gens pour l’accompagner. Pour son père Michel, de telles expéditions étaient pour aller chez les Outaouais, en l’occurrence à Michillimakinac. Quand René part, c’est pour prendre contact avec les Sioux. La rencontre se fait-elle au même endroit que son père ou se rend-il chez les Sioux situés au sud du lac Supérieur? De toute façon, c’est un grand voyage qui doit être planifié.
En 1708, René possède une esclave, Marie, qu’il a achetée à Michillimakinac. Est-ce lui qui l’a achetée à cet endroit? L’histoire est muette sur ce sujet.
Le 6 juin 1731, René se prépare pour un voyage chez les Sioux. C’est avant tout l’engagement d’une personne pour l’accompagner. Le 28 du même mois, il donne une procuration à Madeleine Guillet, son épouse, pour administrer ses biens. Ce qui est curieux, c’est qu’il aurait signé un billet, le 3 juillet alors qu’il était chez les Sioux. Cinq jours, c’est un peu court pour faire ce trajet. S’il était chez les Sioux, il y a erreur de date.
Il est de retour la même année. Le 18 février 1732, il se retrouve chez le notaire pour préparer un deuxième voyage. Le 20 août de la même année, il est encore chez les Sioux. Au mois de juillet de l’année suivante, il est toujours en voyage. Son épouse, Madeleine Guillet, doit passer chez le notaire pour régler ses affaires. En 1734, René est de retour au printemps, après la fonte des neiges.
Les emprunts faits par René laissent filtrer une partie de ses activités faites comme coureur des bois. Pour échanger des fourrures avec les Indiens, on doit avoir quelque chose à offrir en contrepartie. Pour la traite officielle, les marchands acceptent toujours de faire crédit. Cependant, pour celle faite de façon illégale, tout doit être payé comptant.
Entre 1713 et 1754, vingt fois, René emprunte officiellement de l’argent; on ne compte pas les emprunts officieux. (Les achats de terres étaient financés d’une autre manière.) La majorité des prêts sont faits avant 1737 alors qu’il est âgé de trente et un à cinquante-quatre ans, période où il est capable de faire la vie de coureur des bois. Ils viennent de plusieurs personnes. Comme il n’a pas été poursuivi en justice, il devait rembourser ses créanciers.
Les terres de René
Essayer de faire un relevé des terres de René est un travail difficile. Dans l’inventaire des biens de nos ancêtres, on trouve souvent un terrain qu’ils possèdent sans trouver aucun acte d’achat. À plusieurs reprises, j’ai noté dans les biens d’une personne, la mention d’un document avec la date et le nom du notaire. Vérification faite, le document est introuvable dans son minutier. Il devient donc difficile de suivre la trace du propriétaire de certains terrains.
René a reçu de son père, un fief dans la seigneurie du Cap-St-Michel. On retrouve également des terres à la Guillaudière, seigneurie située dans la partie est de Varennes, appartenant à sa sœur Marguerite. Il en possède également à Belœil, aux Cèdres et sur le Richelieu dans la seigneurie de monsieur de Contrecœur. Il a vendu, à Batiscan, ses droits hérités de la succession de son beau-père. J’ai trouvé également le contrat d’une maison qu’il possédait à Québec.
Il a donné des concessions dans son fief et a vendu sa maison de Québec. Au cours des dernières années de sa vie, René possédait peu de terres. À deux occasions, vers la fin de ses jours, il en a donné à son fils René. Sa terre aux Cèdres a été achetée pour son esclave Jean-Baptiste Duchesne. Le 15 mai 1754, elle est vendue. L’histoire ne dit pas si Jean-Baptiste a abandonné sa terre. Bref, si René a fait beaucoup d’affaires, il semble qu’il ait beaucoup dépensé.
Il est souvent identifié comme le sieur Duchesne, probablement en honneur de sa grand-mère maternelle Judith Duchesne. Je crois que c’est sa décision personnelle de porter ce titre. Il est, à Varennes, de 1721 à 1738, capitaine de milice, comme son père l’a été. L’histoire ne dit pas si c’est l’âge ou certains démêlés avec la justice qui ont terminé sa carrière.
Le 29 octobre 1751, René est à Montréal pour signer un contrat avec un forgeron. Avec un associé, ils projettent de construire un moulin à scie aux Cèdres. À Montréal, ils demandent à un forgeron de fabriquer toutes les ferrures nécessaires à la construction du moulin. Ils prennent possession de la marchandise au printemps suivant. 1752 est consacrée à la construction du bâtiment.
Jusqu’à son décès survenu le 22 mai 1758 à Varennes, René est actif dans les affaires. Quelquefois, c’est une concession qu’il donne dans son fief au Cap-St-Michel; en d’autres occasions, il signe des reconnaissances de dettes. Sa présence est également mentionnée pour un baptême, un mariage ou un décès. Il laisse un fils de qui descendent aujourd’hui quelques familles portant le nom de Messier et d’autres, le nom de Duchesne.